Industrie 4.0, compétences numériques et emplois du futur

Zone collaborateurs
6 juillet 2020
Institut national des mines

L'Institut national des mines nous présente un texte traitant des changements technologiques importants qui toucheront ce secteur d'activité au cours des prochaines années. 

Au cours des prochaines années, le secteur minier, à l’instar des autres industries au Québec, connaîtra une nouvelle vague de transformation. Les technologies numériques associées aux démarches d’amélioration continue et d’optimisation des procédés poseront alors des défis cruciaux en matière de développement et de mise à niveau de la main-d’œuvre. La numérisation des entreprises minières aura des conséquences importantes sur les compétences requises pour occuper plusieurs postes. Elle imposera notamment la mise en place de programmes de formation continue pour actualiser les compétences de la main-d’œuvre. Identifier dès maintenant les nouvelles compétences des travailleurs qui permettront de soutenir la transformation numérique est un thème qui interpelle à la fois les enseignants des établissements d’enseignement publics, les professionnels de l’orientation et les départements de formation et de ressources humaines de l’industrie.

Les technologies numériques permettent déjà de dégager l’opérateur de certaines tâches pénibles et répétitives pour qu’il se consacre à des tâches à plus forte valeur ajoutée. Désormais, aux compétences du métier s’ajoutent de nouvelles compétences numériques, essentielles pour réussir la transition vers l’industrie 4.0. Seules les entreprises qui sauront relever le défi des nouvelles compétences numériques maintiendront leur accès au personnel qualifié nécessaire à leurs opérations.

Compétences numériques, pourquoi?

Plus qu’une simple tendance, les compétences numériques constituent un incontournable dans la transition en cours vers une automatisation accrue de l’industrie minière. Ces compétences renvoient aux habiletés techniques des individus en situation professionnelle. Plus spécifiquement, elles représentent la capacité d’un travailleur à employer ses connaissances, ses habiletés et ses attitudes afin d’utiliser des technologies numériques pour :

1. analyser, sélectionner et évaluer de manière critique des données numériques;

2. résoudre des problèmes;

3. développer de nouvelles connaissances collaboratives et s’engager dans des pratiques organisationnelles qui nécessitent l’utilisation quotidienne du numérique.

 

Développer cette capacité implique une maîtrise des interactions entre trois grandes familles de compétences numériques, les compétences techniques, collaboratives et cognitives.

Les compétences techniques consistent à savoir utiliser les technologies de manière efficace, efficiente, sûre et adaptée. Elles sont nécessaires à l’exploration de nouveaux contextes numériques ainsi qu’à la résolution de problèmes en utilisant les outils numériques proposés dans le cadre du travail. Concrètement, il s’agit d’ouvrir et fermer correctement des logiciels, des applications ou des appareils et d’être en mesure d’utiliser leurs différentes fonctions. Il peut également s’agir d’effectuer des opérations de stockage de fichiers ou de consulter des bases de données.

Les compétences collaboratives se rapportent à la capacité des individus à collaborer et à résoudre des problèmes dans des environnements numériques. Ce sont les connaissances, les habiletés et les attitudes permettant aux employés d’interagir efficacement les uns avec les autres par le biais du numérique. Concrètement, elles nécessitent que chaque employé ait une compréhension globale de son propre rôle et de son impact sur les autres utilisateurs des systèmes et des processus. Elles renvoient à la compréhension des enjeux associés à la cybersécurité et à la confidentialité des données. Ces compétences consistent à recevoir, à modifier et à transmettre des informations par plusieurs moyens numériques dans une dynamique de travail collaboratif.

Les compétences cognitives concernent la capacité à sélectionner, à interpréter et à évaluer l’information numérique. La maîtrise des compétences numériques implique de détenir les connaissances, d'avoir les habiletés et d'afficher les attitudes requises pour lire, localiser, sélectionner, interpréter, intégrer, créer, stocker et évaluer les données générées ou captées par les systèmes informatiques de l’organisation. Ces compétences réfèrent donc à la littératie et la numératie dans un environnement numérique.

Ces trois grandes familles de compétences numériques interagissent entre elles. Par conséquent, il est nécessaire d’envisager les compétences numériques dans leur intégralité.

L’importance de la formation

La transition numérique exige davantage qu’un énième plan de formation en entreprise. Elle suppose un projet d’éducation au numérique construit en étroite collaboration entre les différents intervenants et un meilleur arrimage entre les besoins des entreprises et les compétences acquises en contexte de formation initiale en établissement d’enseignement. Renforcer l’arrimage entre la formation offerte dans le réseau de l’éducation et les besoins en matière de compétences numériques exprimés par les entreprises minières débute donc avec la promotion des programmes de formation et des emplois qui en découlent.

Transformation des professions et des métiers du secteur minier

Dans plusieurs secteurs d’activité, l’automatisation, la robotisation et les technologies de l’information créent de nouveaux types d’emploi. En 2013, le Département du Travail des États-Unis soutenait que 65 % des élèves du primaire occuperaient des emplois qui n’ont pas encore été inventés. Environ 50 % des activités de travail courantes sont techniquement automatisables par l’adaptation des technologies actuelles (MGI, 2017). Dans l’industrie minière canadienne, environ 52 % des tâches pourraient être automatisées (Brookfield Institute, 2017).

Les emplois touchés par l’automatisation ne disparaîtront pas entièrement. Les tâches manuelles dans des environnements prévisibles seront davantage exécutées par des robots. Cependant, les travailleurs réaliseront toujours les tâches relatives à ces emplois, qui sont actuellement impossibles à automatiser. En général, ces tâches sont associées à des exigences supérieures en ce qui concerne la formation préalable et les aptitudes professionnelles. En se basant sur ce qui précède, on peut donc présumer que les postes demandant uniquement un diplôme d’études secondaires ou professionnelles seront plus rares qu’actuellement, tandis que ceux nécessitant des diplômes d’études collégiales ou universitaires seront plus nombreux.

Actuellement, la transformation de la nature du travail dans le secteur minier touche surtout l’automatisation et le contrôle à distance des opérations. De nouveaux rôles sont créés, particulièrement pour les opérateurs et les techniciens en maintenance d’équipements, en traitement des données, en analyse des systèmes et des processus et en contrôle et planification des opérations. Ces nouveaux rôles sont exercés à partir de consoles situées dans des centres d’opération à distance.

Des changements importants auront un impact sur certaines tâches exécutées jusqu’ici de façon manuelle, celles du mineur sous terre par exemple. Désormais, grâce aux stations d’opération d’équipements à distance, il lui sera possible de continuer à effectuer son travail depuis la surface au moment des dynamitages souterrains. Les opérateurs de chargeuse-navette peuvent actuellement non seulement effectuer leur activité sous terre, mais aussi programmer leur équipement à la fin de leur quart de travail afin d’être en mesure, une fois remontés à la surface, de poursuivre le déblaiement de leur chantier à distance. Ainsi, le mineur peut continuer sa tâche en toute sécurité, même si les conditions souterraines ne permettent pas la circulation de travailleurs.

De nouveaux emplois verront le jour et auront nécessairement un impact sur la formation donnée aux prochains diplômés de formation minière. Des compétences devront être développées et s’appliqueront dans une grande variété d’occasions, aussi bien dans la vie personnelle que professionnelle. Elles seront personnelles (gestion du changement), interpersonnelles (communication, travail d’équipe), occupationnelles (polyvalence, ingéniosité) et cognitives (esprit d’analyse, discernement). Non spécifiques à une occupation particulière, elles permettront d’évoluer et de prospérer dans différents emplois et environnements de travail. Actuellement, cet ensemble de compétences n’est pas intégré aux programmes de formation minière professionnels, techniques ou universitaires.

Cette automatisation dans le secteur minier est une tendance déjà bien ancrée au Québec, et personne ne peut l’ignorer. Le transfert des emplois moins spécialisés vers ceux qui nécessitent davantage de compétences techniques et scientifiques devient inévitable. Il apparaît donc important que les programmes de formation menant à l’obtention d’un diplôme d’études professionnelles ou collégiales s’adaptent aux nouvelles réalités imposées par l’automatisation, la robotisation et les technologies de l’information dans le secteur minier. D’ailleurs, près d’une quinzaine de métiers et de professions du secteur minier présentés dans l’outil REPÈRES sont mis à jour régulièrement par l’Institut national des mines afin de dévoiler notamment les compétences demandées, les nouveaux outils technologiques utilisés et les tâches associées aux différents emplois occupés. De plus, l’Institut tente de démontrer, grâce à ses publications, les changements que suscitent l’innovation.

Conclusion

L’émergence et la croissance de l’automatisation dans les activités d’exploration et d’exploitation minières ainsi que dans le traitement du minerai nécessitent de prendre un temps de réflexion pour se pencher sur les connaissances et les compétences qui seront essentielles aux travailleurs miniers. En matière de compétence numérique, il est difficile de développer un ensemble unique de connaissances, d’habiletés et d’attitudes génériques, applicables en tout temps et dans tous les contextes. La réussite repose plutôt sur une combinaison judicieuse des ressources disponibles. Le défi sera de taille pour les futurs diplômés du secteur, des industries québécoises et une adaptation du profil de compétences établi par les conseillères et conseillers d’orientation du Québec.


 

Références

  • L’Institut national des mines du Québec a pour mission de soutenir le gouvernement dans l’exercice de sa responsabilité en matière d’éducation dans le secteur minier. Il agit comme conseiller auprès du gouvernement en s'appuyant sur des projets de recherche qu'il réalise et sur les suggestions proposées par les acteurs du milieu de l'éducation et du secteur minier afin de faire la promotion de la formation minière au Québec, au Canada et dans le monde. En juin dernier, l’Institut a lancé une étude intitulée : « Transformation numérique et compétences du 21e siècle pour la prospérité du Québec : l’exemple de l’industrie minière ».